Les Tunisiens, un peuple qui prend ses chimères pour des réalités

La nouvelle désillusion des Tunisiens après la défaite de leur sélection nationale face à l’Australie, samedi dernier, 26 novembre, après l’euphorie du match nul obtenu face au Danemark quatre jours auparavant, dans le cadre de la Coupe du Monde de football Qatar 2022, donne à réfléchir sur la naïveté de ce peuple et sa propension à prendre ses chimères pour des réalités.

Par Imed Bahri *  

Commentant l’ambiance morose qui règne depuis cette défaite dans tout le pays, l’ancien ambassadeur Elyes Kasri a, dans un post Facebook, situé ce passage brusque de l’euphorie à l’abattement, tout aussi excessive l’une que l’autre, dans un contexte psychosociologique qui en dit long sur la versatilité des Tunisiens, leur naïveté et l’inconsistance de leur intelligence collective, qui leur font avaler facilement toutes les couleuvres, au point de s’auto-aveugler eux-mêmes et de courir derrière des chimères, au lieu de croire aux vertus du travail, de l’effort et du mérite.

Cuite, désillusion et gueule de bois   

«Depuis 2011, les rêves des Tunisiens se sont heurtés à la triste réalité dans tous les domaines y compris le sport. Ces collisions à répétition avec la réalité trouvent leur origine chez un peuple qui semble préférer le rêve et les fantasmes au dur labeur ainsi qu’à des dirigeants qui ont profité de cette naïveté pour lui fourguer leurs chimères et incompétence», écrit le diplomate, qui ajoute, avec une douloureuse ironie : «Chaque cuite est suivie d’une gueule de bois et d’une facture de plus en plus salée. Dans l’attente du discours de la sobriété qui tarde à venir.»

Ce discours de sobriété, rationnel et courageux, seul des dirigeants politiques honnêtes peuvent en assumer les conséquences : il consiste à dire au peuple «sa» réalité, sans fards ni mensonges, l’appeler à compter sur lui-même et lui expliquer que seuls l’effort, le mérite et le don de soi peuvent lui permettre de sortir de la crise où il s’enfonce chaque jour un peu plus et d’améliorer peu à peu sa situation sur tous les plans, y compris celui du sport.

Dans l’histoire récente de l’humanité, d’autres peuples y sont parvenus, en quelques décennies de dur labeur et de quête de l’excellence, comme les Japonais et les Allemands, qui au lendemain de la seconde guerre mondiale étaient à genoux, ou encore les Coréens ou les Chinois, qui en seulement deux générations sont passés du sous-développement au leadership technologique mondial. Rien n’empêche les Tunisiens d’en faire autant, mais ce ne sera pas sans effort et sans sacrifice.

En quête de repères

La facilité, le moindre effort et la débrouillardise n’ont jamais produit des miracles. Or, c’est de miracles que nous avons aujourd’hui besoin en Tunisie, à commencer par la sélection Rouge et Blanc qui, pour espérer passer au second tour pour la première fois de son histoire en six participations à la phase finale de la Coupe du Monde, doit gagner son troisième match de groupe contre la France, champion du monde en titre et déjà en lice pour se succéder à lui-même au trône du football mondial.

Ce sera après-demain, mercredi 30 novembre, au Qatar, mais si, en football, une victoire est toujours possible, elle ne sera jamais obtenue par la ruse, la débrouillardise et les effets de manche, mais par l’effort, la rigueur, la discipline, l’organisation et le don de soi.

Les Aigles de Carthage sauraient-ils voler très haut et donner l’exemple à un peuple qui doute et qui a besoin de modèles, de repères et de raisons de croire encore en lui-même ?

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