Le poème du dimanche : ‘‘Les migrations de la terre’’ de Deema Shehabi

Deema Shehabi (ديمة الشهابي) est une poète née au Koweït en 1970 de parents réfugiés palestiniens, son père originaire de Jérusalem, sa mère de Gaza.

En 1988, la poétesse s’installe aux Etats-Unis pour faire des études supérieures d’histoire, de relations internationales puis de journalisme. Elle vit en Californie avec sa famille, travaille comme éditrice et enseignante. Ses poèmes marqués par la tragédie palestinienne, ont paru dans de nombreuses revues et anthologies. Ecrit en anglais, son premier recueil est Thirteen Departures from the Moon.

En français : Diaspo Renga, avec Marilyn Hacker, Ed. Al Manar, Paris.

 Tahar Bekri

«Alors, dis-moi à quoi tu penses lorsque le ciel est de cendre ?»

Mahmoud Darwich

Je pourrais te dire que l’écoute est faite pour le ciel de cendre,

Et qu’au cri du muezzin dont la voix s’étire comme

pleurs au point du jour,

j’entends mon propre désir tandis que mes lèvres se posent

sur la joue de ma mère.

Et lorsqu’à genoux près d’elle, je me souviens de ses imprécations

le jour où elle a ouvert tout grand les portes de chez elle

aux enfants en fuite devant les chars.

Ma mère est de Gaza, mais que sais-je des migrations de la terre,

lorsque sur un toit de Gaza je fais mes ablutions devant le front

de cendre du ciel, quand mon âme erre, ridée de patrie ?

Je pourrais te dire que j’ai quitté ma mère en patrie

de peau. Dans le rêve,

mes lèvres étaient tuméfaction, son corps plénitude retrouvée,

et nues nous dansons dans la rue.

Il n’est d’enfant qui comprenne l’absence une fois passée

La douceur des paumes.

Comme si les paumes de mon père exsudaient la louange tandis

qu’il faisait la toilette de ma mère selon le rite funèbre.

Comme si c’était le pouls de Dieu qui lui battait la joue

pour disparaître.

Traduit de l’anglais par Jean Migrenne 

Source : ‘‘Poésie de Palestine’’, Tahar Bekri, Ed. Al Manar.

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