Dans le communiqué ci-dessous, publié mercredi 10 septembre 2025, avant l’annonce officielle par le ministère de l’Intérieur d’une attaque «préméditée» contre le navire Alma de la Flottille Al-Soumoud, amarrée au port de Sidi Bou Saïd en attente du départ pour Gaza, sans préciser l’identité de l’auteur présumé de l’attaque en question, le Centre pour le respect des libertés et des droits de l’homme en Tunisie (CRLDHT) s’interroge si la Tunisie n’était pas devenue une cible pour Israël. Sauf que l’Etat hébreu n’a pas revendiqué (ou pas encore) les deux attaques…
En moins de 72 heures, les frappes israéliennes se sont étendues à plusieurs fronts : le Liban, la Syrie, le Yémen, le Qatar et la Palestine. Dans ce contexte accéléré, la question de la Tunisie devient légitime et urgente : la Tunisie est-elle à son tour devenue une cible ?
En Tunisie précisément, le 9 septembre 2025, l’un des navires de la Flottille du Sumud, appelé Family Boat, a pris feu alors qu’il était à quai dans le port de Sidi Bou Saïd. Les images, témoignages et sources indépendantes ont confirmé que l’incendie résultait d’une attaque de drone israélien. De leur côté, le ministère de l’Intérieur et la Garde nationale ont publié des communiqués officiels niant ce scénario, affirmant que le feu avait démarré de l’intérieur, dans une partie des gilets de sauvetage, et qu’aucun drone n’avait été détecté dans le ciel.
Le 10 septembre 2025, un autre navire de la Flottille du Sumud, baptisé Alma, a subi un incendie limité à Sidi Bou Saïd, que l’équipage a attribué à une attaque de drone. Cette fois, les autorités tunisiennes n’ont émis aucune réaction officielle, laissant planer un vide qui accentue l’opacité des faits.
Cette contradiction entre ce que documentent les témoignages et ce que déclarent — ou taisent — les autorités, ne dissipe pas l’inquiétude : elle l’amplifie et soulève des questions vitales sur la souveraineté, la sécurité et la transparence de l’information.
La convergence entre l’escalade régionale et les incidents de Sidi Bou Saïd place le gouvernement tunisien à la croisée de deux dynamiques : un colonialisme qui étend sa logique de force au-delà des frontières et une dictature qui rétrécit l’espace de vérité à l’intérieur. L’incapacité des autorités à gérer ces faits avec transparence n’est rien d’autre qu’un nouvel aveu des limites de la démagogie et de l’autoritarisme : une posture qui, au lieu de résister à l’occupant, se compromet dans l’occultation de la vérité.
La dictature, même si elle est moins spectaculaire que les massacres, n’en demeure pas moins dangereuse. La manière dont le gouvernement tunisien a réagi à une atteinte réelle à sa souveraineté dévoile la fausseté de son discours : un discours qui attaque le migrant et s’incline devant l’expulseur, qui produit l’injustice et se tait face à l’oppresseur, qui ouvre les prisons aux voix libres au lieu de les protéger.
Quant au colonialisme, il est le visage extérieur de cette répression intérieure : il fabrique une réalité livide, visant les voix libres et les pensées courageuses par la violence, l’arrogance et la barbarie. L’État d’occupation n’a cessé de violer la loi, les normes, la raison et l’humanité, trouvant dans la dictature un allié objectif qui lui prépare le terrain en falsifiant les faits et en muselant les consciences. Si la dictature étouffe la voix à l’intérieur, le colonialisme cherche à en effacer l’écho à l’extérieur. Le résultat est le même : étouffer la vérité et criminaliser la liberté.
En conséquence, nous :
- Renouvelons notre solidarité avec la Flottille du Sumud et tous ses participants,
- Condamnons les agressions israéliennes répétées, qui ne cessent de s’intensifier et de s’étendre,
- Condamnons explicitement le génocide en cours en Palestine et les crimes de guerre commis contre les civils,
- Appelons les autorités tunisiennes à faire preuve de responsabilité, de courage et de cohérence, en reconnaissant la vérité dans son intégralité et en toute transparence,
- Exhortons la France et l’Union européenne à assumer leurs responsabilités morales et juridiques en imposant des sanctions fermes contre l’État d’occupation,
- Invitons l’opinion publique tunisienne à réfléchir et à s’interroger sur la véritable identité des «patriotes sincères» : est-ce celle de ceux qui dissimulent la vérité et confisquent la liberté, ou bien celle de ceux qui défendent la souveraineté, préservent la dignité et se tiennent aux côtés des droits et des libertés ?
Communiqué.
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