Une lecture attentive du projet de constitution publié au Jort, devant être soumis à un «plébiscite programmé» le 25 juillet courant, révèle un vice de forme potentiel que peu ont sans doute remarqué, ou en tout cas signalé.
Par Faik Henablia *
Outre les grossières erreurs de langue (arabe) relevées par l’universitaire Olfa Youssef, ce projet, présenté comme contenant 10 chapitres, en contient, en réalité, 11, puisque 2 chapitres 4 sont consacrés, l’un à la fonction exécutive, l’autre à la fonction judiciaire, qui sont censées être séparées, à moins que l’on veuille, inconsciemment, les confondre. Dans ce cas, Freud y verrait un exemple criant d’«acte manqué», qui peut satisfaire directement un désir sous-jacent ou inavouable.
Un vice de forme ? Pas seulement
Ce qui nous donne bien les chapitres suivants: 1, 2, 3, 4, 4, 5, 6, 7, 8, 9 et 10.
A moins d’avoir oublié mes cours de calcul, cela nous fait donc bien 11 chapitres.
Sur la forme, soumettre un tel projet à la votation, ferait désordre, même si hélas, le texte présente, sur le fond, bien des dangers autrement plus graves pour l’avenir du pays.
Il faudrait donc, à moins que ce ne soit déjà fait, que l’autorité «compétente» se dépêche de retirer ce texte et d’en publier un autre au Jort, et, si ce n’est trop demander, cette fois-ci sans erreur manifeste.
Car si, ainsi que programmé, le «oui» l’emporte, et que le texte est voté en l’état, il faudrait une révision constitutionnelle pour le modifier.
Non pas que cela poserait un problème insurmontable à un président qui a déjà montré le peu de cas qu’il fait des textes constitutionnels et législatifs, voire même des règlements pourtant édictés par lui-même, le fait est, cependant, que dans un vrai État de droit, une révision constitutionnelle est un processus complexe, soumis à plusieurs règles strictes.
A titre d’exemple, la constitution française de 1958 contient une faute d’accord que les parlementaires ont, jusqu’à présent, préféré ignorer tant la procédure de rectification est rébarbative.
Cafouillage au sommet de l’État
Pour en revenir à notre sujet, cette erreur grossière est une preuve de plus, si besoin en est, du cafouillage et de l’amateurisme ambiants au sommet de l’État, dont le président, pourtant détenteur exclusif du pouvoir, cherche à se démarquer en n’hésitant pas à sermonner publiquement tel ou tel ministre, quand bien même celui-ci est démuni de toute prérogative.
Il est à souhaiter que nos «experts» fassent preuve de davantage de rigueur dans les discussions avec le FMI, faute de quoi le sort de ce pays risque d’être définitivement scellé.
* Docteur d’Etat en droit, ex-gérant de portefeuille associé.
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