L’Occident continue de faire la fine bouche après avoir profité des chantiers faramineux nécessités par l’organisation de la Coupe du monde de football Qatar 2022. L’émirat gazier n’a pas lésiné sur les moyens pour en mettre plein les yeux à la planète tout entière. La Fifa tente de sauver sa mise tout en préservant les apparences. Mais ce festival d’hypocrisies cache mal le cynisme de la communauté internationale.
Par Dr Mounir Hanablia *
Personne ne pourra le nier, lors de la cérémonie d’ouverture de la Coupe du monde de football, dimanche 20 novembre 2022, à Doha, le Qatar a fait les choses en grand et le spectacle fut grandiose.
L’émirat a fait un effort colossal en se dotant de plusieurs stades ultramodernes concentrés sur quelques kilomètres carrés, quelques-uns étant de véritables joyaux architecturaux. Mais si l’émir de cette presqu’île désertique de 260.000 habitants nationaux, qui dispose de l’une des plus importantes réserves de gaz naturel au monde, tablait sur les dividendes politiques de l’évènement en présentant son pays comme étant fortement civilisé à l’avant-garde du progrès du genre humain, les résultats ne semblent pas avoir été à la mesure de ses attentes.
En effet, une très mauvaise polémique a éclaté quelques jours avant le coup d’envoi, entretenue par la même presse occidentale traditionnellement anti-arabe qui – ne pardonnant manifestement toujours pas au Qatar d’avoir obtenu l’organisation de la Coupe du Monde grâce aux procédés que le monde entier utilise – mettait en exergue les 6000 morts qu’auraient occasionnés selon elle les travaux.
A cela s’en est ajoutée une autre, celle de l’interdiction de la consommation de boissons alcoolisées autour des stades et des symboles LGBT.
Le cynisme de la Fifa
Selon Gianni Infantino, ces critiques relèvent du racisme. Le président suisse d’origine italienne de la Fifa est monté au créneau pour défendre le pays hôte et a rappelé au bon souvenir de l’opinion internationale les 25.000 morts engloutis au fond de la Méditerranée parce qu’ils n’avaient pas trouvé de travail chez eux. Il a estimé que les ouvriers morts des chantiers du Qatar avaient connu un meilleur sort parce qu’ils avaient aidé leurs familles. Cette curieuse comparaison qui était censée révéler l’hypocrisie occidentale, que personne ne peut nier, a ainsi surtout mis en lumière le cynisme de la Fifa, particulièrement quand le même président a prétendu que le football unifiait les peuples et appelé le public à se concentrer sur le jeu, le spectacle, alors que la principale raison d’être de ce Léviathan planétaire qu’est la Fifa, c’est naturellement le profit financier.
En effet si tant est que les morts de la Méditerranée eussent acquis brusquement une importance cruciale, il aurait peut-être été opportun de conclure que les dépenses occasionnées par ce méga spectacle païen auraient été mieux employées ailleurs à l’’heure de la surpopulation mondiale, du réchauffement climatique, de l’émigration massive, de l’épuisement des ressources de la planète, et de la pandémie.
La sensibilité musulmane du Qatar, brusquement redécouverte à quelques heures du coup d’envoi face à l’alcool et aux sodomites contre la tradition d’hospitalité arabe envers les étrangers, ne pouvait pourtant pas ignorer la valeur de ces vies humaines perdues, ou de celles qu’il faut encore sauver, pas plus que n’aurait pu le faire le sentiment charitable chrétien.
La logique mercantile
Quant au sport, personne ne peut nier que dans le football, ce soient désormais les clubs des championnats anglais, espagnol, italien, qui assurent le meilleur du spectacle, et non plus les sélections nationales dont les joueurs ne se réunissent qu’occasionnellement. Qui plus est, avec le calendrier démentiel imposé à l’élite mondiale dans les clubs, les meilleurs joueurs ont d’autant moins tendance à s’investir dans les équipes nationales que, et les exemples de Benzéma et Mané le prouvent, le risque de blessure s’est considérablement accru.
De surcroît avec la logique mercantile qui a cours, il est normal que le réflexe de tout joueur soit de se préserver au bénéfice du club qui lui assure un salaire plus que confortable, que les primes éventuelles en équipe nationale sont loin de couvrir.
Enfin, si l’on en juge par la prestation peu convaincante de l’équipe au maillot lie de vin (l’équipe du raisin dans la terminologie musulmane utilisée à Doha) battue très logiquement par l’Equateur en match d’ouverture, l’intérêt des dirigeants du Qatar pour cette Coupe du monde est manifestement ailleurs. **
* Médecin de pratique libre.
** Mammon est le dieu de la richesse dans la bible.
Donnez votre avis