La native du Sahel tunisien joue au tennis depuis l’âge de 3 ans; aujourd’hui, elle a 28. Soit un quart de siècle passé à apprendre la maîtrise de l’art de toucher la balle jaune avec une raquette, de slicer, d’amortir, de faire le grand écart pour renvoyer une balle au filet ou au fond du court, d’exécuter un revers à deux mains, un revers entre les jambes, un coup croisé, un coup droit… Analyse en 8 tableaux des résultats, des gains et de la carrière de la plus grande championne tunisienne, arabe et africaine de tennis…
Par Samir Gharbi
Ons sait jouer sur toutes les surfaces, le gazon (comme à Wimbledon), le dur résineux (comme à l’US Open et l’Open d’Australie) et la terre battue, qui est la surface la plus exigeante en termes de condition physique, en raison de la vitesse de jeu réduite (comme à Roland Garros).
Ons a même réinventé le jeu à sa façon. Les Américains la qualifient, justement, de «trailblazer» (pionnière). Les Britanniques la surnomment «The magician» (la magicienne), les Tunisiens la considèrent comme leur «ambassadrice du bonheur»…Son bilan «en pro» : pour les tournois organisés par l’ITF (Fédération internationale de tennis), il est de 11 trophées et 4 finales perdues; et pour les tournois organisés par WTA (Association du tennis féminin), financièrement plus dotés : 3 trophées et 7 finales perdues.
Les fondamentaux
Tableau 1 : Le classement général : Ons Jabeur, 16 ans, entame sa carrière pro en 2010 au rang de 583e WTA. A cette époque, sa compatriote Sélima Sfar, 32 ans, en fin de carrière (aujourd’hui analyste de tennis à beIN Sports), pointait à la 281e place.
A la fin de l’année 2010, Ons, opérée au poignet, arrête de jouer pendant cinq mois : son rang descend à la 634e place… Elle reprend du service et parvient à se hisser en deux ans au Top 200 (2013-2015). Rechute en 2016, elle perd aux matchs préliminaires de qualification à Wimbledon puis à l’US Open. Depuis, sa courbe ascendante la propulse au Top 50 en 2020, au Top 10 en 2021 et au 2e rang mondial en juin 2022…
Tableau 2 : Le capital «points» : Après douze ans de travail, le nombre de points engrangés à la WTA s’élève à 5 090, cinquante fois plus qu’à la fin de 2010. Mais cette progression n’est pas suffisante pour lui permettre d’accéder un jour à la 1ère place mondiale occupée par la Polonaise Iga Świątek, 21 ans, qui capitalise 10 365 points, le double d’Ons ! Ses rivales qui pointent à la 3e et 4e place ne sont pas loin, à environ 1 000 points. Si Ons ne gagne pas assez de points pour maintenir l’écart, elle sera rattrapée et dépassée d’ici la fin de 2023.
Tableau 3 : L’âge du capitaine : Certes, à 28 ans, Ons peut encore garder sa forme et son 2e rang, mais ses poursuivantes sont plus jeunes, en particulier, Coco Gauf, 8e rang a 18 ans. Le 2e rang est significatif pour sa participation dans les tournois (choix des têtes de série) et dans le financement de son activité (sponsoring).
Tableau 4 : Les matchs joués : Ons Jabeur a joué, au cours de sa carrière pro, 602 matchs (au 12 septembre 2002). C’est un lourd fardeau, mais en même temps, une expérience technique qui parfois lui permet de remporter un match ou un point décisif. Son taux de victoires (nombre de matchs gagnés sur nombre de matchs joués) est de 65%, soit deux matchs sur trois sont gagnés. Ce n’est pas assez par rapport aux performances des numéros 1 (80%).
Tableau 5 : Les gains financiers : Ons Jabeur, qui n’est pas encore au bout de sa carrière, a engrangé des gains cumulés de près de 9 millions de dollars au cours des 602 matchs qu’elle a joués depuis 2010. Ce n’est pas beaucoup par rapport à ses rivales : Iga Świątek a encaissé depuis 2018 des primes d’un montant global de 14 millions de dollars. Caroline Garcia, qui a commencé en 2011, a touché plus de 13 millions de dollars (en 715 matchs). La championne «en argent» est la Roumaine Simona Halep avec 40 millions de dollars (depuis 2008 pour 817 matchs joués). Ces gains ne sont pas que des bénéfices, car ils permettent à la joueuse de financer son encadrement sportif et son management professionnel. Ils sont complétés par les apports des sponsors, lesquels sont tributaires des performances sportives…
L’exceptionnelle performance de 2022
Tableau 6 : Le nombre de points : Les gains réalisés seulement au cours des neuf premiers de 2022 est très significatif des efforts réalisés par Ons Jabeur : elle a cumulé 1 300 points, moins évidemment que la n°1 mondiale qui a fait (2 000 points), mais largement supérieur à celui des autres joueuses du Top 10.
Tableau 7 : Les primes de matchs : L’année 2022 sera faste pour Ons. A neuf mois, les primes encaissées (4,8 millions de dollars, dont 1,3 million à l’US Open) équivalent à tout ce qu’elle a gagné au cours des années 2010 à 2021. C’est la 2e meilleure performance, après celle d’Iga Świątek (9,2 millions), dans le tennis féminin.
Tableau 8 : le taux de réussite : Consciente des enjeux et de la concurrence qui se fait plus forte que jamais, Ons Jabeur a nettement amélioré sa constance dans le jeu et sa technique. Son taux de victoire a ainsi grimpé de 10 points, passant à 76% (pour 58 matchs joués)… proche du niveau requis pour des championnes en titre (80 % et plus). La Polonaise Iga Świątek en est à 89% pour 64 matchs joués. C’est dire qu’Ons a encore du progrès à faire. Elle souhaite ardemment, au cours de sa nouvelle carrière de n°2 mondiale, remporter le trophée d’un tournoi du Grand Chelem. Le prochain sur sa liste de combat est celui de l’Open d’Australie en janvier 2023.
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