Né en 1951 à Tunis, Samir Marzouki, est professeur des universités, spécialiste d’Apollinaire, poète, narrateur, essayiste, auteur pour jeunesse et producteur à la Radio de Tunis.
Il a occupé de hautes fonctions administratives, à l’échelle nationale et internationale. Et publié une quinzaine d’ouvrages dans les domaines de la littérature, l’enseignement et la pédagogie, ainsi que deux recueils de poésie : ‘‘Braderie’’, MTE, 1991; ‘‘Je ne suis pas mort’’, Cérès, 1996.
Tahar Bekri
(Faire suivre svp)
Bonjour mon père
Tu n’es pas mort
Tu vis encore dans mes enfants
Ils ont tes mains et tes colères
Tes attendrissements d’enfant
Là-haut mon père es-tu tranquille
As-tu suffisamment de livres
Y a-t-il là-haut de grands raseurs
Y a-t-il des empêcheurs de vivre
Y a-t-il de savants ignorants
Et des docteurs qui n’ont rien lu
Deux trois idées suffisent-elles
Pour se proclamer philosophe
Et mêle-t-on les détritus
Aux soies de la plus belle étoffe
As-tu souvent de nos nouvelles
Sais-tu tous les soucis que j'ai
Perds-tu encore le sommeil
Quand quelqu’un t’a fait enrager
Et qu’écris-tu mon père au Ciel
Sont-ce poèmes ou récits
Poursuis-tu donc l’ardente étude
Où t’a surpris l’affreux coma
Es-tu écrivain populaire
Comme sur terre tu l’étais
Bonjour mon père écoute-moi
Ici tu sais tout a changé
Le monstre étend ses tentacules
Et rampe en suçant nos cerveaux
Hélas il ne s’arrêtera
Que quand les hommes seront veaux
Dis-moi comment explique-moi
Comment faire pour retrouver
Ce beau pays ce grand pays
Où tu vécus que tu as fait
Avec les hommes qui l’aimaient
Les sadikiens les zitouniens
Les destouriens les communistes
Les religieux les agnostiques
Avec ceux qui ne savaient rien
Avec tous ceux qui savaient peu
Les ouvriers les commerçants
Les médecins les artisans
Les ingénieurs les paysans
Lorsque ce peuple était uni
Qu’il regardait vers l’horizon
A tous ceux-là dis-leur mon père
Qu’ils nous envoient quelque courage
Avec beaucoup d’abnégation
Et qu’ils mettent dans le colis
De quoi tenir pendant l’orage
L’amour profond pour ce pays
De la raison de la vertu
Avec quelques paroles sages
Adieu mon père adieu mon père
Pardon pour le dérangement
Et fasse Dieu que quelque part
Notre famille se rassemble
Pour le moment tu vis encore
Dans mes enfants qui te ressemblent
‘‘Je ne suis pas mort’’, Cérès éditions, Tunis, 1996.
(Remerciements à l’auteur)
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