Né à Sousse en 1927 et décédé à Tunis en 1999, Sleim Ammar est l’un des pionniers de la psychiatrie au Maghreb. Il est aussi poète à ses heures.
Outre son exercice médical en Tunisie, il se distingue par de nombreux essais consacrés à la médecine et aux sciences arabes. Et dans la grande tradition musulmane, il met son savoir érudit en vers, laissant une œuvre originale, scientifique et littéraire..
Poème de la science arabe, préface du Pr Jean Bernard, Alif, Tunis, 1990; Poème de la folie; L’art de la composition, Tunis, 1993.
Tahar Bekri
Avicenne*
Puis c’est au XIe siècle, en Orient, l’apogée
Qu’illustre Avicenne, une ère prolongée
Dans le Maghreb arabe et à l’extrême Ouest
Par l’éclat du XII e siècle sans conteste.
«Prince des Médecins», le «Maître par excellence»
Fut sans doute Avicenne culminant dans la science.
Génie précoce, dont la vie aventureuse
Mais exaltante aussi sera talentueuse,
Dans nombre de domaines : chimie et physique,
Sciences naturelles, morale et logique.
Il excella de plus dans la géodésie,
Dans les mathématiques et dans la poésie..
Philosophe éminent, connu pour ses maximes,
C’est en médecine qu’il atteignit les cimes,
Son Canon embrassa les règles en usage
D’un savoir médical enrichi davantage.
Bible médicale, selon William Osler
Jusqu’au VIIIe siècle, elle sera le bréviaire
Auquel toute faculté d’Europe se référait,
Traitant par le mépris celui qui l’ignorait
Son «Urjuza fi Ettib» ou poème médical
Résumant le Canon fut aussi un régal
Pour tous les connaisseurs de toute prosodie
Et des commentateurs de ce qui est bien dit.
De mIlle trois cent vingt six vers il fut composé
Traduit en plusieurs langues, souvent analysé.
Depuis, la médecine fut caractérisée
Par ces fameux poèmes d’où a été puisé
Le style des cantiques latins et médiévaux
Et qui furent chantés et par monts et par vaux.
Avicenne connut l’action des moisissures
Des ankylostomes, filaires, oxyures,
Il traita de l’empyème et de la méningite,
De la goutte, du cancer, des signes de pleurite,
Comme l’apoplexie, issue de la pléthore
De l’ulcère d’estomac, des spasmes, du pylore,
Et d’autres maladies internes ou exogènes
Et de l’hérédité en pressentant les gênes
Mais aussi d’obstétrique et de chirurgie,
De la thérapeutique, loin de toute magie
En dorant la pilule et tout l’enrobant,
Il la fit accepter au plus récalcitrant.
Puis sous son impulsion, l’organothérapie
Ouvre plus tard la voie de l’opothérapie.
Psychologue émérite, psychosomaticien,
Nombre d’anecdotes en témoignent fort bien
Dans la prophylaxie, il eut un grand apport
Par les bains, les régimes, et les vertus du sport
Finalement aucun chapitre de notre art
Ne sera délaissé ni traité sans égards
Son œuvre capitale appréciée pour longtemps
A vraiment culminé dans l’espace et le temps
Extrait de ‘‘Poème de la médecine arabe’’, éd. Alif, Tunis, 1990.
* Ibn Sina, (Boukhara, 980-Hamadhan,1037) NTD
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