«Regards de femmes» | Cinéastes arabes entre elles

De jeunes réalisatrices arabes ambitieuses, diplômées d’écoles de cinéma, ont choisi d’entrer dans le monde du septième art par la grande porte. Le Festival international du film de femmes «Regards de femmes», dont la 6e édition a eu lieu du 11 au 15 octobre 2025 à Nabeul, Hammamet et Menzel Temime (Tunisie), les a réunies dans une résidence artistique de formation exclusivement féminine.

Monia Kaouach

Ce lieu sûr et inspirant leur a permis de se concentrer sur leur apprentissage et leur création. Convaincu de leur potentiel, le festival s’est engagé à les accompagner et à les soutenir pour leur permettre de percer dans un secteur encore largement dominé par les hommes. Elles ont été initiées à la technique du pitch court, à la promotion de leurs œuvres et à la manière de convaincre un producteur en moins de cinq minutes.

Expression et résistance

Organisée chaque année par la Fédération tunisienne des ciné-clubs (FTCC), le festival préserve sa marque de fabrique : une approche cinématographique féminine et engagée. La résidence a accueilli quatorze réalisatrices venues de dix pays arabes – Tunisie, Égypte, Liban, Koweït, Libye, Syrie, Palestine, Jordanie, Maroc et Algérie – unies par le même rêve et confrontées aux mêmes obstacles : le manque de financement, la difficulté de production et la recherche de soutien technique et artistique. Elles partagent aussi la conviction que le cinéma est un moyen d’expression et de résistance, capable de briser les tabous et de raconter les réalités féminines du monde arabe.

Les participantes ont évoqué les contraintes sociales et culturelles qui freinent leur créativité. Malgré tout, elles sont parvenues à exprimer leurs idées et leurs convictions dans leurs films, reflétant leurs milieux économiques, sociaux et politiques.

La réalisatrice égyptienne Malak El Sayyad a osé traiter, dans son documentaire, de sa propre maladie gynécologique, décrivant avec franchise le processus de diagnostic et de guérison, affrontant ainsi le tabou du corps féminin dans la société arabe.

La Koweïtienne Farah Al Hashem, diplômée en création cinématographique, a abordé les thèmes de l’exil, de la perte d’identité culturelle et de l’impact du pétrole et de la richesse sur la société koweïtienne.

Fatima Jomaa, réalisatrice libanaise, a quant à elle raconté les ravages de la guerre et ses conséquences personnelles : un ami tué le jour de son mariage et un mari reporter parti couvrir les combats après trois jours d’union.

La Libyenne Noura Ali, avec son film ‘‘La Dame de la mer’’, a décrit la condition des femmes rurales de son pays : contraintes par des traditions pesantes, elles cherchent leur liberté ailleurs, parfois dans la fuite, souvent dans la mer, symbole de délivrance.

Enfin, Imen El Arbi (Tunisie), étudiante en master de cinéma, a souligné combien cette expérience lui a appris à travailler sur la profondeur psychologique des personnages et à tirer profit de la diversité culturelle des participantes.

Rahma Ben Jemaa primée pour son film ‘‘Amal’’.

Déconstruction des stéréotypes

La scénariste tunisienne Samia Amami, responsable de l’encadrement, a décrit l’expérience comme unique et profondément humaine. Elle a insisté sur la difficulté mais aussi la richesse d’accueillir quatorze femmes venues d’univers culturels et sociaux différents. Elle explique avoir voulu créer un espace sûr et non compétitif, favorisant la libre expression et la confiance en soi. Elle a transmis aux réalisatrices les fondamentaux du travail cinématographique : l’importance du récit avant l’image, la cohérence du scénario et la prise en compte du regard du spectateur. Dr Manel Souissi, fondatrice du festival, a rappelé avoir créé cet événement lorsqu’elle présidait la FTCC. Son objectif : offrir aux femmes arabes un espace de création et de visibilité, face à leur représentation encore timide dans le cinéma arabe.

Outre la résidence, le festival a organisé une compétition de courts métrages réalisés par des femmes venues de six pays : Liban, Syrie, Tunisie, Palestine, Égypte et Maroc.

Le Prix de la meilleure image de la femme dans un film a été attribué à la réalisatrice égyptienne Malak El Sayyad pour ‘‘Je t’ai dit’’, documentaire autobiographique sur sa maladie.

Le Prix du meilleur film achevé est revenu à la Tunisienne Rahma Ben Jemaa pour ‘‘Amal’’, où elle raconte la lutte de sa mère contre le cancer.

Le festival a également organisé des ateliers et débats sur la déconstruction des stéréotypes de genre et la prévention du harcèlement dans le milieu du cinéma, tout en rendant hommage à la grande cinéaste tunisienne Selma Baccar, pionnière du cinéma féminin arabe.

Texte original en arabe traduit en français par Tarek Kaouache, avec le concours de l’IA.  

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