De mémoire d’amateur de sport en général et de football en particulier, je n’ai pas souvenir d’un dirigeant sportif aussi arrogant et nuisible que Wadie Jary, qui préside d’une main de fer aux destinées de la Fédération tunisienne de football (FTF) depuis 2012. Mais jusqu’à quand ?
Pr. Mondher Azzouzi *
Pour avoir pris en otage, à lui tout seul, des centaines de milliers de citoyens amateurs du sport roi et pour les avoir privés depuis des années de regarder la compétition nationale, comme c’était la coutume depuis toujours, sur les chaînes de télévision nationales, ce monsieur doit disposer d’un pouvoir sans limite.
Bien que le niveau de notre football soit moyen, pour ne pas dire parfois médiocre, l’engouement suscité par les confrontations entre les clubs constitue la seule respiration pour des centaines de milliers de citoyens et particulièrement les jeunes désœuvrés, qui plus est, en cette période de crise économique et sociale difficile à vivre pour tout le monde.
Le nivellement par le bas
M. Jary prive les amateurs de football de regarder les rencontres de leurs clubs favoris sur les chaînes nationales au prétexte que celles-ci n’ont pas les moyens de payer les droits télévisés. Et il n’arrête pas de répéter que la FTF a engrangé sous son règne des recettes record, comme si son rôle consistait seulement à faire rentrer l’argent. On aurait tant aimé mettre à son actif quelque titre international obtenu par les Aigles de Carthage. Mais on n’ose même plus rêver d’un titre continental.
Ce qu’on observe, c’est, au contraire, le nivellement par le bas du niveau des clubs, tous d’ailleurs en difficulté financière, face à une fédération qui étale sa richesse.
On aurait aimé aussi voir M. Jary et sa camarilla venir en aide au football national par un plan de redressement qui commencerait par les clubs : la véritable pépinière des talents. Ces talents qui sont devenus rares sous nos cieux et que M. Jary va désormais chercher en Europe, parmi les enfants de notre communauté à l’étranger, ou en tout cas ceux parmi eux qui n’ont pas les moyens techniques de jouer sous les couleurs de leur pays natal ou d’adoption.
Or, s’il traduit quelque chose, ce recours systématique aux joueurs souvent re-naturalisés, reflète l’échec personnel de ce médecin qui, avec tout l’argent à sa disposition, n’a pas su mette en place des écoles de formation pour donner naissance à de jeunes talents capables de conquérir l’Europe et de revenir renforcer l’équipe nationale.
Un responsable off-shore
Grand manœuvrier devant l’Eternel, M. Jary n’a finalement «réussi» qu’une chose : écarter un compatriote, Tarek Bouchamaoui, de l’exécutif de la Confédération africaine de football (CAF), pour prendre sa place. Et depuis, il n’a rien fait pour aider les clubs tunisiens engagés dans les compétitions continentales et qui sont souvent désavantagés par rapport à leurs adversaires.
Au lieu de se battre à côté de son compatriote et d’essayer d’obtenir, le cas échéant, un second siège à la Tunisie au sein de l’exécutif continental, il s’est acharné contre lui et a tout fait pour l’évincer, se contentant lui-même d’un strapontin à la tête de la commission médicale qui lui revenait naturellement, puisqu’il est médecin de formation. En quoi ce poste a-t-il été utile au football tunisien? Une planque pour lui, sans plus.
Elu et réélu par les présidents des clubs tunisiens à la tête de la FTF, M. Jary continue d’imposer ses diktats sur le plan national, profitant de son statut de responsable off-shore et de la protection de la Fifa, l’une des instances internationales les plus corrompues.
Jusqu’à quand le règne nuisible de M. Jary va-t-il se poursuivre ? Nous posons cette question aux présidents des clubs dont beaucoup ont souvent eu maille à partir avec lui mais qu’il a souvent réussi à mettre dans la poche ou sous l’éteignoir.
* Médecin cardiologue à Lyon.
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