‘‘Chronique d’un régime dictatorial aux Comores – La démolition d’une nation’’, paru le 17 juillet 2025 chez L’Harmattan, à Paris, est le manifeste d’un avocat et militant des droits humains franco-comorien qui refuse de rester silencieux face à l’arbitraire. Saïd Larifou y dresse un réquisitoire sans concession contre le colonel Azali Assoumani, retraçant son accession au pouvoir par des coups d’État militaires puis électoraux, et dénonçant une dérive autoritaire où répression, corruption et mainmise sur les institutions sont devenues la norme.
Djamal Guettala
La quatrième de couverture résume bien la ligne directrice de l’ouvrage qui met en lumière l’effondrement de la nation, de l’État de droit et de la cohésion sociale. Il dénonce la violence politique, la gestion clanique de l’économie et le rôle tentaculaire de la famille présidentielle. Il évoque également les conditions sociales désastreuses de la population, les persécutions visant la diaspora et l’inefficacité d’une diplomatie souvent soumise ou frileuse.
Malgré ce tableau sombre, Larifou souligne l’émergence d’une résistance populaire et l’espoir d’un changement, porté par la jeunesse et la diaspora, et esquisse les contours d’une transition démocratique possible après Azali.
Résistance intérieure
Dans un entretien qu’il a accordé au Matin d’Algérie, Larifou revient sur son parcours personnel et politique : son arrestation en 2009 pour «outrage au chef de l’État», les méthodes de répression systématique qui se sont installées depuis, et l’impossibilité de réformer le régime de l’intérieur. Il insiste sur le rôle clé de la diaspora comorienne, qui devient, selon lui, «notre principal espace de liberté politique» et doit participer à la transformation du pays. Il rappelle aussi que la résistance intérieure existe, incarnée par des citoyens ordinaires, des enseignants, des juristes et des jeunes qui, malgré le climat de peur, refusent de céder.
Larifou dénonce également le silence complice des institutions internationales : l’Union africaine, la France, les Nations unies sont accusées de privilégier une stabilité de façade plutôt que la justice réelle. Pour lui, seule une pression internationale ciblée, combinée à une mobilisation populaire structurée et un front commun des forces politiques et citoyennes, pourra créer les conditions d’une transition démocratique crédible.
L’auteur fait un constat clair : la justice comorienne est aujourd’hui instrumentalisée, mais des magistrats intègres et des avocats courageux existent encore. Leur rôle sera central dans la reconstruction d’un État de droit.
Appel à l’action
Le livre se veut ainsi un appel à la mémoire, à la vigilance et à l’action, montrant que la résistance ne se limite pas aux critiques politiques, mais s’incarne dans le courage de ceux qui, au quotidien, refusent de se soumettre.
Enfin, Larifou s’adresse à trois publics : les Comoriens, pour leur dire qu’ils ne sont pas seuls; la jeunesse, pour l’inviter à prendre la relève avec lucidité et courage ; et la communauté internationale, pour qu’elle cesse de soutenir l’inacceptable. Son message est simple : le peuple comorien mérite un État de droit, une justice indépendante et une économie au service de tous. ‘‘Chronique d’un régime dictatorial’’ devient ainsi à la fois un réquisitoire et une pierre posée dans la reconstruction de la nation.
Ce livre se lit comme un acte de résistance : un cri pour la vérité, un manifeste pour la justice et un appel à la refondation démocratique. À travers son analyse, Saïd Larifou transforme la colère et l’injustice en force mobilisatrice, offrant une vision d’avenir pour un pays qui a longtemps souffert dans le silence, mais dont la jeunesse et la diaspora sont prêtes à relever le défi.
Saïd Larifou, avocat comorien de renom, est une figure emblématique de la lutte pour la démocratie en Afrique. Fondateur du parti Ridja, il s’oppose fermement au régime d’Azali Assoumani et milite pour une gouvernance juste. Deux fois battu au second tour des élections présidentielles, il a subi prison, harcèlements judiciaires et tentatives d’assassinat. Surnommé le «Robin des bois de la démocratie panafricaine», il s’est illustré dans des procès majeurs, notamment ceux de Bob Denard et du Front national pour l’assassinat d’Ibrahim Ali. Il défend également des figures panafricaines comme Ousmane Sonko et Guy Hervé Kam, et agit à travers l’ONG Avocats pour l’Afrique.
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