Mohamed Aziza dit Shams Nadir est poète, narrateur, essayiste et universitaire tunisien. Né en 1940 à Tunis, il a occupé de hautes fonctions à l’Oua et à l’Unesco. Et animé longtemps l’Université euro-arabe.
Outre des essais sur la calligraphie arabe, les formes traditionnelles du théâtre et les arts africains, il a publié des ouvrages poétiques: Silence des sémaphores, 1978; Le Livre des célébrations, 1983; L’Astrolabe de la mer, 1980; Les Portiques de la mer, 1990; Planisphère intime, 2018 et Le Chant des sirènes, 2019.
Ce poème inédit dont il a gratifié les fidèles de cette rubrique poétique dominicale fera partie d’un ensemble qu’il compte faire paraître sous le titre de Quatrains du soir et du matin. Le poème fera partie des Quatrains du soir, Les Quatrains du matin comporteront les poèmes composés pour un dialogue imaginaire avec Omar Khayam.
Elle fut longue à traverser
Cette ronceraie hérissée d’épines.
Il fut long à décompter
Ce temps baillant ses jours effrités.
Elles furent interminables à veiller
Ces nuits de lunes exténuées
Ils furent blafards et poisseux
Ces matins au goût d’amandes amères.
Sur les rades de nos ports désertés
Sous l’ombre portée de nos Propylées
Les photos floues de nos jours jaunis
Et l’arête effilée de nos souvenirs évanouis.
Comme un arbre émondé
Comme une éclosion avortée
Dans le marc de café
Je lis les routes de l’exode.
Sur les nervures claires du jour qui se lève
Il me faut reverdir les prés sous le givre
Raviver les marées d’équinoxe
Et accompagner le colibri, extincteur d’incendies.
Que serait l’avenir
Sans les arrhes données au destin
Que serait l’espoir
Sans l’adulation du matin ?
Que serait l’aurore
Sans la pénombre du soir
Que serait le miel
Sans l’amertume des coloquintes ?
Que serait la faim
Sans les fruits de l’arbre aux tourterelles
Que serait la soif
Sans le don de l’amphore habillée d’algues ?
Que serait le silence
Sans les pampres ensemencés du chant
Que serait la mémoire
Sans la rumeur exhalée de la conque ?
Que serait le sommeil
Sans le tulle vaporeux des rêves
Que serait le vide de la mer
Sans la farandole iodée des péninsules ?
Que serait la blessure
Sans la psalmodie du chaman
Que serait l’accomplissement
Sans les fougères de l’enfance ?
(Remerciement de l’auteur).
Donnez votre avis